Résiliation de bail d’habitation pour non-paiement des Loyers et expulsion des locataires – Analyse du Jugement du Tribunal Judiciaire de Paris, 19 septembre 2024

Le Cabinet PRAXIDICE AVOCAT (Maître Valentin VACHER) a récemment saisi le Tribunal judiciaire de PARIS (Juge des contentieux de la protection) qui par un jugement rendu le 19 septembre 2024 par le Tribunal judiciaire de Paris (n° RG 24/04372) a fait droit à la demande en condamnant solidairement les locataires à payer la créance due tout en prononçant la résiliation du bail d’habitation. 

Ce jugement aborde les problématiques juridiques complexes entourant la résiliation de bail pour défaut de paiement des loyers, la solidarité entre époux, et les conditions de l’expulsion des locataires.

I. Contexte de l’affaire : Non-paiement des loyers et rupture de la solidarité entre les locataires

Le litige concerne Mme [A] [T] et ses copropriétaires, qui ont consenti un bail en 2010 à Mme [K] [P] et M. [U] [J] pour un logement familial. En raison de plusieurs mois d’impayés accumulés depuis 2023, les bailleurs ont assigné les locataires en justice, sollicitant la résiliation du bail, l’expulsion et le recouvrement des sommes dues.

Les défendeurs, bien que liés initialement par une solidarité locative, présentaient des situations personnelles et familiales différentes au moment du jugement. Mme [K] [P] faisait valoir sa précarité, alors que M. [U] [J] avait donné son congé en 2023 et contestait être redevable des dettes postérieures à son départ.

II. Les fondements de la résiliation du bail pour non-paiement des loyers

A. La clause résolutoire et l’exigence de gravité du manquement

Le tribunal a rappelé que la résiliation de bail pour non-paiement repose sur les articles 1224 et 1229 du Code civil, qui prévoient qu’un manquement grave, notamment l’inexécution de l’obligation essentielle de paiement des loyers, justifie la résolution du contrat. En l’espèce, les loyers impayés sur plusieurs mois atteignaient une somme significative, ce qui a permis au juge de caractériser la gravité du manquement contractuel de Mme [K] [P] et de prononcer la résiliation du bail.

B. L’effet rétroactif de la résiliation et ses conséquences

La résiliation du bail a pris effet rétroactivement au jour de l’assignation en justice (21 mars 2024), conformément à l’article 1229 du Code civil. Cette rétroactivité implique que les obligations de paiement et les autres effets du bail cessent dès cette date, bien que le locataire restant dans les lieux doive verser une indemnité d’occupation équivalente au loyer, fixée ici à 2 801 euros mensuels.

III. La solidarité entre les locataires époux malgré la séparation

Comme développé et soutenu par le Cabinet PRAXIDICE AVOCAT, le tribunal a retenu l’application des dispositions de l’article 220 du Code civil, qui établit que les époux sont solidairement responsables des dettes relatives à l’entretien du ménage. Bien que M. [U] [J] ait quitté le domicile en 2023, le logement étant considéré comme le logement familial au moment de son départ, il restait solidairement redevable des loyers impayés pour la période antérieure à la résiliation du bail.

Plus particulièrement, le Tribunal judiciaire a retenu que le logement donné à bail constituait la résidence de l’enfant mineur du couple, une semaine sur deux. En conséquence, M. [U] [J] restait tenu solidairement avec Mme [K] [P] épouse [J] du paiement des loyers dus en exécution du bail conclu par eux pour assurer le logement de la famille, malgré le congé délivré.

Cette approche juridique de la situation des locataires a permis aux demandeurs de voir imputer partie de la créance directement à l’encontre d’un débiteur solvable.

IV. La procédure d’expulsion et les mesures de protection du locataire

Le tribunal a assorti la décision d’une exécution provisoire, permettant ainsi aux bailleurs de recouvrer les sommes dues et de procéder à l’expulsion sans attendre un éventuel appel.

V. Les condamnations financières 

Le tribunal a condamné Mme [K] [P] et M. [U] [J] solidairement au paiement de l’arriéré locatif (16 806 euros) et a ajouté une indemnité d’occupation pour Mme [K] [P] seule, de 9 243,30 euros pour la période allant de mars à juin 2024. Cette décision confirme que l’occupation postérieure à la résiliation entraîne une obligation compensatoire pour le locataire restant dans les lieux.

Conclusion

Ce jugement du Tribunal judiciaire de Paris met en lumière des aspects clés du droit locatif et de la solidarité des époux, malgré une procédure de divorce en cours, en matière de baux d’habitation. Il rappelle également l’importance de l’exécution provisoire pour le bailleur dans les cas de créances locatives significatives. En somme, cette décision apporte un exemple didactique de la manière dont le droit locatif et les protections procédurales des parties sont appliqués en cas de résiliation de bail et de procédure d’expulsion.

Lien de la décision : https://www.courdecassation.fr/decision/66ec6b98a4ac292313a4efa0